Offrir davantage de déplacements propres aux zones périurbaines, une priorité
La Fabrique de la Cité est un think tank dédié à la prospective et aux innovations urbaines créée par le Groupe Vinci. Alphonse Coulot y a coordonné une étude réalisée par Ipsos destinée à mieux comprendre les modes de déplacement et les attentes des français vis-à-vis des mobilités bas-carbone. Quelles sont les conclusions qu’elle met en évidence ?
La voiture domine largement les déplacements individuels, pourtant, 76% des personnes que vous avez sondées indiquent qu’elles aimeraient s’en passer pour leurs déplacements quotidiens. Quels sont les freins qu’elles évoquent ?
Nous avons réalisé ce sondage à l’échelle nationale puis, à l’échelle de trois villes que sont Tours, Toulouse et Nice et ce qui est intéressant c’est que peu importe l’échelle considérée, les réponses à cette question sont les mêmes. Un grand nombre de répondants indiquent qu’ils aimeraient bien se passer de la voiture, mais la moitié de cette part indique qu’elle ne peut tout simplement pas. Nous pensons que cette catégorie de personnes est peut-être la plus intéressante pour l’étude.
Le plus souvent, ces personnes habitent en périphérie et utilisent la voiture pour des déplacements professionnels du quotidien allant au-delà de 15 kilomètres, et la première raison pour laquelle elles ne peuvent pas s’en passer, c’est tout simplement parce qu’elles ne disposent pas d’alternatives. Le premier frein évoqué est donc lié à une inadéquation entre l’offre proposée en termes de transports dans les zones périphériques et les besoins de leurs habitants.
Ce constat peut rejoindre d’autres études réalisées sur la France périphérique ou même sur le mouvement des gilets jaunes. Une grande partie des répondants reprochent aux pouvoirs publics d’en faire moins et se sentent délaissés. La difficulté de se passer de sa voiture fait donc office de révélateur de situations sociales assez isolées et met en évidence le fait que les offres de transport n’ont pas été pensées au-delà de 15 kilomètres. Cela donne une ligne assez claire pour agir.
“Le premier frein est lié à une inadéquation entre l’offre proposée en termes de transports dans les zones périphériques et les besoins de leurs habitants.”
Quels sont les modes alternatifs à la voiture individuelle qui rencontrent le plus de succès parmi les personnes sondées ?
À l’échelle nationale, la marche à pied et le vélo sont les modes les plus plébiscités et il y a aussi une forte attente vis-à-vis de la qualité des transports en commun. Il faut toutefois garder à l’esprit le fait que parmi les répondants, beaucoup habitent en ville et donc, que les réponses fournies doivent être lues au regard des lieux de vie des personnes sondées.
Ensuite, la voiture électrique ou hybride est souvent évoquée cela montre bien à quel point il est nécessaire de conserver la voiture individuelle comme une solution. La supprimer serait envisageable pour les villes mais pour les espaces périurbains ce serait plus compliqué, voire carrément impossible pour les zones rurales.
La question des transports en commun est également intéressante. Ce n’est pas forcément le mode préféré des Français mais c’est, selon eux, le premier mode dans lequel il faut investir de façon prioritaire. Ces derniers ne satisfont que peu de gens tant du point de vue de la qualité du réseau que de sa fiabilité et encouragent beaucoup à préférer la voiture.
Plus largement, quelles priorités de transformation les conclusions de cette étude sous-entendent-elles pour entraîner une transition durable et homogène des mobilités ?
Le premier constat revient à dire qu’il ne faut pas s’occuper des centres-villes en priorité mais plutôt des flux périurbains allant vers la ville. Dans les zones périurbaines, la dépendance à la voiture est forte mais également coûteuse, d’un point de vue monétaire mais aussi environnemental.
Finalement, c’est au sein de ces zones dans lesquelles les habitants montrent des caractéristiques de densité et de fréquentation qui justifieraient l’usage de transports en commun qu’il y a les plus grandes attentes, peut-être même plus que dans les zones rurales où le déploiement des transports en commun a moins de sens.
Le deuxième constat vise à faciliter la recharge de la voiture électrique. Sur les grands axes, la plupart des concessionnaires proposent déjà des services de qualité qui vont être complets d’ici 2023. Toutefois, dès que l’on s’éloigne de ces axes, les difficultés de compétences ne sont pas encore réglées et freinent considérablement l’utilisation du véhicule électrique et donc les changements d’usages. Développer un réseau de recharge qui puisse quitter les grands axes est donc primordial.